AD INFINITUM est un groupe prolifique. Depuis Chapter I – Monarchy en 2020, le quatuor enchaîne les sorties et nous livre déjà un quatrième album. Après une trilogie inspirée par la vie de personnages historiques, aux sonorités power et symphonique, AD INFITUM ouvre un nouveau livre, plus personnel et plus moderne avec le nouvel album Abyss, disponible le 11 octobre 2024 via Napalm Records. L’occasion de retrouver la fondatrice et chanteuse Melissa Bonny pour une nouvelle interview.
Bonjour Melissa, je suis très contente de t’avoir en interview aujourd’hui. J’ai eu la chance de pouvoir t’interviewer en 2021, c’était ma première interview, il y a presque trois ans jour pour jour !
Ah ! Merci pour l’invitation.
Avant de discuter de votre nouvel album Abyss, j’aimerais revenir un petit peu en arrière. Vous avez déjà sorti trois albums, sous forme d’une trilogie. Pourquoi ce choix ? Il me semble qu’avec le nouvel album vous repartez pour une nouvelle trilogie !
Oui c’est ç ! En fait pour la première trilogie, ce n’était pas vraiment prévu comme ça. On a simplement sorti notre premier album qui s’appelait Chapter I, puis le deuxième, Chapter II et le troisième, Chapter III. Après ces trois albums, on a décidé de faire quelque chose de différent, cela a donc a un peu fermé le chapitre qu’est cette trilogie et ça l’a défini en tant que trilogie. Mais ce n’est pas quelque chose qu’on avait prévu à la base contrairement à cette nouvelle trilogie qui est prévue dès le départ comme telle. On a décidé de ne pas « seulement » offrir un album qui n’est connecté à aucun autre album,, mais de faire quelque chose, comment dire, de penser un peu plus loin et de connecter le visuel, le son, le concept, pour offrir un univers.
La première trilogie était basée sur la vie de personnages historiques. Cette fois je suppose que ce sera donc quelque chose de complètement différent ?
Oui, c’est quelque chose de beaucoup plus personnel. On s’est dit que, autant pour la musique que pour les paroles, on avait envie de vraiment prendre le temps de définir ce que ce qui nous ressemble maintenant, Ad Infinitum en 2024, enfin fin 2023 quand on a commencé à écrire. Définir un son qui nous représente maintenant, avec nos inspirations, avec nos capacités, mais aussi sans forcer quelque chose dans notre musique qui nous représenterait. Par exemple je pense aux orchestrations symphoniques qui étaient une part assez grande de notre son pour les trois premiers albums mais qui n’ont pas forcément trouvé leur place dans le quatrième album.
Pour revenir un peu plus au thème, quand je vois le titre de l’album, Abyss, je pense aux profondeurs des océans. Est-ce qu’il y a un lien ou c’est moins littéral que ça ?
C’est plutôt une métaphore pour les endroits sombres de notre esprit, les endroits qui sont pleins de doutes, de peur, de démons. On a vraiment puisé dans les émotions humaines et dans les expériences personnelles pour créer cet album et en vue des deux prochains albums.On a fait le tri des émotions qu’on a envie d’explorer et d’exprimer, et on a pris les plus sombres pour cet album.
D’accord, donc il y aura donc bien une identité précise pour chaque album ?
Exactement. Par contre ce qui est intéressant c’est qu’il y a donc une identité pour chaque album mais au niveau visuel tout est connecté. On a déjà commencé à connecter les vidéos, d’ailleurs c’est intéressant de voir que certains fans ont déjà trouvé les petits Esster eggs dans les vidéos, les petits éléments qui connectent chaque vidéo à la prochaine. On a envie de faire ça pour l’ensemble des trois albums.
En ayant déjà cette vision en amont, avez-vous commencé un petit peu déjà à composer la trilogie dans son ensemble, ou est-ce que vous composer vraiment un album après l’autre ?
On fait album après album mais le concept, les visuels et l’idée globale sont déjà posées sur papier. On a des chansons pour la suite les premières démos mais on veut se donner le temps, on n’a pas envie de rusher le prochain et de se dire ok la trilogie doit sortir en tant de temps, non on a vraiment envie de prendre le temps de laisser chaque album vivre sa vie.
On parlait de changement de style avec par exemple la fin des arrangements symphoniques, on l’a ressenti ça dès la sortie de votre premier single il y a quelques temps déjà, « Outer Space », qui a peut-être un peu questionné les fans ?
Oui c’est clair, il y a eu des réactions vraiment variées, on s’y attendait, mais il y a eu beaucoup de réactions positives parce qu’on a fait ça de manière très sincère et non de manière calculée. Je crois notre évolution résonnent avec beaucoup de gens, soit des anciens fans qui aiment notre son et notre façon d’écrire et qui connectent aussi avec ce nouveau son, soit des nouveaux fans qui n’étaient pas forcément fans de sympho à la base et qui maintenant s’intéressent à ce qu’on fait. Bien sûr, il y a des gens qui nous ont dit « écoutez nous on aimait bien la version Ad Infinitum symphonique et le nouveau style c’est pas vraiment pour moi »… C’était vraiment une salade de réactions auxquelles on s’attendait mais qui a été très positive au final.
C’est vrai que d’un côté quand je compare au premier album, on sent vraiment une grande différence, et en même temps je trouve que cela a été progressif, à chaque fois il y avait des morceaux qui vous rapprochait de ce nouveau style.
Oui exactement, on a à chaque fois fait un petit pas dans cette direction. Mais on a été très conservateur par rapport à ça pour l’album numéro 2 et 3 : on s’est dit on a commencé en tant que groupe sympho, il faut donc qu’on reste quand même un petit peu dans cette zone. Et pour ce quatrième album on s’est demandé ce qu’on avait envie de faire et de jouer sur scène. On n’a pas envie de se mettre dans une boîte ou bien de penser à ce que les gens attendent de nous. On voulait vraiment faire ce qui nous était propre.
Oui justement le live a eu une influence sur votre évolution ? Vous n’avez pas trop pu tourner au tout début.
Oui bien sûr, on a commencé au début de la pandémie et on pouvait pas tourner. Notre premier album est sorti en mars 2020, quand tout a commencé. On s’est dit mince, personne ne va en entendre parler de notre album, mais comme tout le monde était à la maison et que tout le monde avait besoin de divertissement, c’est le contraire s’est produit en fait. Il y a eu pas mal de réactions et le fait qu’on était presque que deux ans à la maison nous a permis de travailler plus et de sortir le deuxième album l’année d’après, et le troisième album un peu plus d’une année après… Tout s’est enchaîné et ça a joué un rôle vraiment important dans le début de notre carrière.
Je voulais aussi parler de votre single « Surrender » qui est un exemple de ce nouveau style, que ce soit le titre en lui-même ou le clip avec une chorégraphie et des danseuses.
Cette chanson est la chanson la plus expérimentale de l’album. On voulait la sortir en tant que single dès le moment où on l’a terminé. On s’est dit que c’est une chanson qui n’aller pas faire l’unanimité mais on l’adore et on a envie de s’amuser et Nick, notre batteur, avait cette idée et cette envie d’avoir des danseuses ou des danseurs dans une des vidéos, d’avoir quelque chose un peu plus chorégraphiée. Une de mes amies d’enfance – on a grandi dans le même village, on a été dans les mêmes écoles – est maintenant chorégraphe et danseuse partout dans le monde mais basée aux Etats-Unis. C’était l’occasion parfaite de se réunir pour un projet, on n’avait jamais fait un projet professionnel ensemble donc c’était l’opportunité parfaite.
Ah c’est super ! Mais j’imagine qu’il y a eu quelques critiques parce que forcément un clip comme ça ne rentre pas dans les stéréotypes du metal on va dire !
Mais c’est pas grave ! C’est pas metal, mais pourquoi, qu’est-ce qui définit metal ? C’est quelque chose qui dans le passé me touchait, les opinions, à quoi on doit ressembler, quel type de musique on peut écrire si on se définit en tant que groupe de metal, qu’est-ce qu’on doit porter etc. Maintenant j’ai réalisé, tout le monde dans le groupe a réalisé, que de quoi qu’on fasse, ça ne pourra pas plaire à tout le monde, donc autant faire quelque chose qui nous plaît à nous.
Surtout que c’est très bien, je pense que beaucoup de gens seront d’accord avec moi ! Est-ce que tu pourrais parler d’une autre chanson de l’album, « Anthem For The Broken , c’est une des chansons qui m’a le plus marquée personnellement.
Ah c’est cool parce que justement on va sortir une vidéo, ce ne sera pas la prochaine mais elle va sortir après la sortie de l’album. C’est une chanson qu’on a écrite avec l’idée de la jouer sur scène, dans des festivals et on se projetait dans le scénario où les gens chantent avec nous. C’est une chanson qui est faite pour justement chanter ensemble avec le public, et on se réjouit de pouvoir, je pense qu’on va la jouer pendant la tournée qui commence la semaine prochaine. On est encore en train de débattre la setlist mais je pense qu’on va la jouer la semaine prochaine, ça va être intéressant de voir les réactions.
L’artwork de Abyss est lui aussi bien différent de la trilogie Chapter. Est-ce que tu peux me parler de l’artiste qui l’a réalisé ?
L’artiste est Stefan Heilemann, il a travaillé avec pas mal de groupes. On a aussi discuté avec lui de la trilogie complète pour qu’il ait une idée d’où on veut aller et de la connexion qu’on peut créer entre chaque album, chaque artwork. Pareil pour les vidéos d’ailleurs, comme je disais tout à l’heure. On a voulu faire quelque chose de différent pour aussi marquer ce changement, le fait que c’est plus un album Chapter et que le son change, on a voulu aussi visuellement faire quelque chose de différent, d’un peu plus abstrait. On lui a donné tout le concept pour les trois albums et il a fait opérer sa magie.
Est-ce qu’au niveau de ton chant aussi tu as évolué pour ce nouvel album ?
Oui, j’ai pas mal utilisé de techniques différentes, que je n’avais pas utilisé dans les albums précédents, et puis aussi des dynamiques différentes. Il y a pas mal de chant qui est plus doux. J’avais l’impression d’avoir tendance à… tu sais, à me dire que c’est du metal alors il faut que je chante fort, enfin pas fort mais avec de la puissance. Cette fois j’ai pas mal expérimenté avec des dynamiques différentes grâce à la magie du studio et des micros. Je me suis bien amusée avec ça, on a fait pareil avec les instruments, avec aussi des petits ear candy, des petits trucs sympas ici et là avec la voix.
J’ai vu que tu étais dans le projet de recherche sur les voix extrêmes de la chanteuse et Youtubeuse The Charismatic Voice, alors est-ce qu’on peut en savoir un petit peu plus, si tu peux en parler.
Oui bien sûr. C’est quand même mieux d’aller regarder car ils ont sorti toute une panoplie d’informations, de vidéos, ils ont leur crowdfunding avec toutes les infos donc je suis pas la meilleure personne pour parler en détail de tout ça. Ils m’ont contactée pour me demander de participer on va faire toute une série de tests sur la voix, sur le corps, pour en apprendre plus sur le fonctionnement des voix extrêmes et sur ce qui se passe dans le corps quand on screame. Des tests audios, des tests visuels, de la caméra proche des cordes vocales. On va être observé dans un scanner vidéo pour voir les parties du corps qui sont activées quand on screame et d’autres tests. Bref, toute une série qui va être faite sur chaque chanteur. Et aussi avec des électrodes dans la gorge, ça va être sympa ! A ma connaissance ce sont les tests les plus poussés des voix extrêmes. Il y a eu des tests qui ont été faits par le passé mais jamais aussi approfondis.
J’avais vu la vidéo avec Will Ramos sur la caméra. Donc on va voir tes cordes vocales à toi la prochaine fois.
Voilà !
Il y a plein d’autres news qui te concernent qui sont sortis récemment. Ton autre groupe, The Dark Side of the Moon, sera bientôt une petite tournée en Allemagne. Vous avez un album en préparation peut-être ?
Alors nouvelles chansons oui, nouvel album on verra si on est prêt. Mais on a envie de sortir du nouveau matériel pour cette tournée.
Tu as l’habitude de collaborer avec de nombreux groupes, Warkings, dArtagan, Feuerschwanz… Je ne vais pas tous les citer ! Par contre, pour une fois, on te retrouve toute seule sur un nouveau morceau car tu as sorti un nouveau single solo, « Gravitate ». C’est important pour toi d’avoir ton projet rien qu’à toi ?
Oui c’est important pour moi parce qu’en sortant quelque chose en mon nom, je peux faire quelque chose que personne n’espère ou que personne n’attend. Ce que j’écris pour Ad infinitum ou pour The Dark Side of the Moon doit quand même entrer dans un certain moule. Pour mon projet à moi je peux faire un peu ce que je veux, et sans label. Il n’y a pas de calendrier pour moi, je peux faire un peu ce que je veux, je suis assez libre.
Avant de terminer cette interview, un point sur votre tournée qui arrive. Tout d’abord la tournée avec Kamelot, Blackbriar et Frozen Crown. Il y aura une seule date en France, à Lyon le 25 octobre. Puis une tournée avec Eluveitie, sans passer par la France. Est-ce qu’on peut espérer d’autres dates en France ?
On espère, on aimerait beaucoup avoir notre première tournée en headliner l’année prochaine. Donc on verra si ça se fait, on espère.
Peut-être aussi des festivals ? Peut-être un Hellfest un jour ?
Ce serait bien, moi j’adore le Hellfest, enfin j’y suis allée une fois, mais j’ai vraiment passé un bon moment et j’aimerais beaucoup y jouer.
Merci beaucoup en tout cas d’avoir répondu à cette interview.
Avec plaisir, merci à toi.
AD INFINITUM – Abyss
Sortie le 11 octobre 2024
Napalm Records